Cours de danse Danser la Vie - Toulouse

Cours de danse Danser la Vie - Toulouse

● Juger... une science ou un art ?

Juger... une science ou un art ?
par Walter LAIRD (traduction J.L. VIALA)
Article Ballroom Dancing Times février 1975 (01-02-1975)
Bulletin AMDF n°227 Janv 1983



La façon de noter des juges est un constant sujet de conversation - et combien de fois les résultats de certaines compétitions n'ont-ils pas fait que le public s'amuse de l'apparente incapacité des Membres du Jury.

Il ne se passe pas une année sans que soient contestées les notes de certains juges, lors de championnats de première importance.

Le fait que les notes attribuées par les juges tendent à être si différentes les unes par rapport aux autres, rend les spectateurs bien sceptiques.
L'ampleur de ces différences n'est pas sans étonner non plus les compétiteurs et les autres juges.

Ce manque d'accord engendre beaucoup d'amertume et nombre de discussions acrimonieuses parmi les aficionados de la danse de compétition, qu'ils 'soient professionnels, amateurs ou spectateurs profanes.
Du fait que bien souvent les notes des "experts" ne sont pas en accord, les mots d' "escroquerie" et de "combine" circulent.
Certains compétiteurs dont le seul but dans la vie est de gagner à tout prix essaient de profiter de ce qui leur semble une faiblesse du système : ils "font le tour" des juges pour tenter d'améliorer leur position dans le domaine de la compétition.

Du fait que la vaste majorité des juges des compétitions importantes sont des membres respectés de la profession, des personnes qui ont dédié leur vie à la Danse, peut-il être vrai qu'elles sont incompétentes ou, ce qui est pire, malhonnêtes (comme leurs notations incitent certains à le croire) ou existe-t-il une autre explication ?

C'est mon opinion profonde que pus de 95 % des juges essaient de façon sincère et honnête de se former une idée juste de la performance des compétiteurs qu'ils ont à départager. Les différences entre les notations viennent de ce que les éléments de jugement utilisés sont divers.
J'espère montrer dans l'analyse qui suit, que c'est le système qui est mauvais, et qu’il faut le changer le plus rapidement possible si l'on veut que les juges reçoivent le statut et le prestige qui leur sont dus.

Qui sont les Juges ?

La seule qualification nécessaire à l'heure actuelle, pour juger un championnat important, amateur ou professionnel, est d'être Membre d'une Association de Professeurs affiliée au Bureau Officiel.
Pour être accepté comme Membre, le/la candidat(e) doit avoir au moins 21 ans et avoir enseigné pendant deux ans, convaincre un membre du jury qu'il/elle possède les connaissances techniques des danses concernées, et démontrer qu'il/elle est capable de danser les variations du programme à un niveau acceptable de compétence.

Aucune expérience de la compétition n'est nécessaire, comme il n'est pas non plus nécessaire au candidat de prouver qu'il est capable de juger. L'examen peut avoir été passé l'année dernière ou il y a vingt-cinq ans.

Pourvu que les abonnements soient à jour et que le possesseur de cette carte de membre soit enregistré comme juge par le Bureau, tout est en ordre.

En faisant état de ceci, je ne souhaite nullement suggérer que les personnes qui entrent dans cette catégorie, sont moins compétentes pour jugez que leurs collègues plus expérimentés.
Mais il reste que dans ce pays, une fois que l'on a répondu à ces exigences,aucune autre expérience n'est nécessaire avant d' aller sur la piste, juger de la prestation des meilleurs danseurs du monde.

Ces exigences sont donc le minimum demandé pour juger des compétitions importantes. Cependant, du fait qu'en général, les organisateurs de ces grandes compétitions n'engagent pas des juges à moins qu'ils aient eu une expérience considérable, la divergence des notations dont on a parlé plus haut ne peut être attribuée à un manque d'expérience.

Les juges sont humains, et ils ont en conséquence leur part de vertus et de vices.

Il y a des juges forts et des juges faibles ; il y a des juges qui guident et des juges qui suivent. Il u a des juges qui sont arrogants, supérieurs, agressifs, et des juges qui 'sont sensibles, d'un caractère artiste et doux.
En fait, les juges 'sont des gens normaux, mais ils ont en commun une chose : c'est le savoir, un savoir souvent très complet, de l'art de la Danse de Société.

Le problème est d'être sûr que ce savoir est utilisé pour obtenir un jugement équilibré tenant compte de toutes les facettes de la Danse en compétition, et que ceci soit valable pour l'avenir de la danse et la profession.

Comment les Juges jugent-ils ?

La question évidente qui vient à l'esprit est "quels sont les facteurs sur lesquels les juges fondent leur jugement ?". La Réponse à cette question devrait donner la raison de la majorité des divergences de notations.

Il n'existe pas de "Code de pratique" ou de "Modus operandi" qui donne une indication de la façon dont un juge aboutira à sa décision.

A l'heure actuelle, le juge n'a pas de contrainte. Une liberté totale est donnée quant aux aspect' de la prestation en compétition prise en compte pour former le jugement final.

La majorité des juges répondront, si t'on conteste leur notation : "On me charge de donner mon opinion en tant qu'expert. Mes notes reflètent cette opinion en cette occasion".

On ne peut faire marche arrière. Aucune récrimination n'est possible, non plus que la justification par le juge d'une notation en particulier, car nulle part, il n'est dit quels sont les aspects particuliers d'une prestation que l'on doit prendre en considération, ou l'importance relative de ces aspects.

Le juge est la loi, mais en même temps, il est en position très difficile et incapable de se défendre. Avec le système actuel, une notation divergente des autres n'indique pas nécessairement l'opinion la pire - elle peut indiquer, ce qui est d'ailleurs le cas fréquemment, l'opinion la meilleure.

Inversement, bien sûr, des notations identiques ou semblables ne sont pas nécessairement l'indication d'un bon jugement. Il est très facile de savoir le résultat probable de n'importe qu'elle compétition par une étude des résultats passés et de noter en conséquence.

Quand un juge expérimenté évacue la prestation d'un compétiteur, il prend automatiquement en compte un grand nombre de facteurs. Ceux-ci sont alors comparés à la prestation d'autres couples sur piste, au même moment.
Le fait que le système actuel laisse au juge une liberté complète de choix quant au facteur qui mérite le plue de poids dans l'évaluation de la décision finale est la cause de la vaste majorité des divergences de notation d'un juge à l'autre.

Les valeurs requises :

1 - Musique, Forme de la Danse

1.1 - Basé sur le balancement du corps :
Danses Standard (Valses, Slow Fox, Quick Step).

1.2 - Basé sur le mime :
Effets théâtraux et postures (Tango, Paso Doble)

1.3 - Basé sur l'action du corps :
Danses rythmiques, Danses Latines (Rumba, Samba, Jive et Cha Cha)

2 - Danses de Compétitions Standards et Latines

Eléments évaluables :

2.1 - Nécessite un jugement expert : Qualité = 60 %
- technique : 20 %
- interprétation rythmique : 20 %
- caractèrisation : 20 %

2.2 - Jugement par expert ou public :
Jugement subjectif de la foule : "le courant passe" = 40 %
- chorégraphie : 10 %
- présentation : 10 %
- efficacité : 20 %

Impact global : les Champions (100 %)


Pour faire en sorte que la notation des prestations en compétition soit basée sur quelque chose de plus substantiel que les caprices personnels de certains juges ou la pression de l'opinion publique au cours de la soirée, il est essentiel d'adopter des valeurs de jugement sur lesquelles on se mette d'accord.

Ceci acquis, une ligne de conduite peut-être donnée en conséquence aux compétiteurs, aux entraîneurs, au public et aux juges. Toutes les personnes concernées verront alors très clairement quelles sont les facettes de la prestation qui sont jugées et l'importance donnée à chacune d'entre elles.
Ceci aura pour résultat d'améliorer le niveau de la danse et la raison des notes de certains juges sera plus facilement compréhensible. Très vite le public et les compétiteurs deviendront familiers avec les méthodes utilisées pour juger.

La première des priorités est donc de définir les £acteurs qui doivent être pries en compte et leur importance relative au moment d'établir un jugement comparé des prestations.
J'ai donc construit un tableau montrant le développement à suivre à partir de la musique, dont naît la Danse, jusqu'à la performance finale du danseur de compétition.

Les six intitulés principaux peuvent en gros être appliques aux danses Standards aussi bien qu'aux danses Latines. Ces six intitulés sont les facteurs à considérer séparément et auxquels donner une évaluation individuelle quand un juge fait un jugement comparatif.

Une fois que les facteurs principaux sont isolés, chacun d'entre eux peut être fractionné encore pour révéler un plus grande nombre d'éléments tels que la tenue (le port) les positions de pied et te travail des pieds, etc. sous le titre "Technique"; la silhouette, la tenue vestimentaire et le style, etc. sous le titre "Présentation", et ainsi de suite ; probablement un total de quelques 30 éléments, dont tous ont une influence sur l'évaluation du juge.

Pour l'instant, regardons de plus près les six intitulés principaux qui apparaissent sur la "pyramide".

Ils peuvent ose diviser en deux groupes, dont le premier consiste en
1 : technique - 2 : interprétation rythmique - 3 : caractérisation.

De ces intitulés, que j'appellerai Groupe I, procède la qualité de la prestation du danseur. Cette qualité de ta prestation est un des produits finis importants que la pro.6ession de ta danse vend au public. En commençant par des classes de débutants, en passant par les tests et médailles de niveaux pour les amateurs, jusqu'à l'entrée dans la danse de compétition pour les élèves qui sont intéressés.

Le succès en compétition doit donc refléter l'importance de la qualité : en conséquence, une grande importance doit être donnée aux trois intitulés ci-dessus, dans l'échelle de valeurs du juge.

Si l'on attribue un maximum de 100 % aux six facteurs dont il a été question plus haut, je suggère que les facteurs du Groupe I reçoivent un maximum de 20 %.

L'évaluation des facteurs du Groupe I nécessite, bien sûr, l'expertise du professionnel qui, outre l'entraînement technique et les connaissances tirées du fait qu'il enseigne et entraîne et, si possible, de la compétition à un haut niveau, a eu de nombreuses années d'expérience et est capable d'évaluer tous les éléments concernés en un temps très bref.

Le second Groupe, que j'appellerai Groupe II, couvre :
4 : la chorégraphie - 5 : la présentation - 6 : l'efficacité.

De ce groupe de trois intitulés procède l'impact du couple sur la foule.

Bien que le compétiteur qui réussit en compétition doive posséder ce magnétisme sur la foule, on ne doit pas accorder à cette facette une importance telle que le résultat final soit en fait un jugement de chorégraphie compliquée et de beauté physique.
Si ceci devait arriver, la jeunesse et la gymnastique prendront le pas sur le reste. Les compétiteurs seront alors trop vieux à 25 ans et le vrai art de la Danse sera détruit - ceci est une perspective qui n'est pas très réjouissante ni pour l'avenir de la Danse de compétition, non plus que pour le travail qu'elle apporte à la profession.
C'est pour cette raison que la valeur attribuée au Groupe II doit atteindre un total inférieur au Groupe I, qui est le Groupe de la qualité.

Je suggère un maximum de 10 % tant pour la Chorégraphie que la présentation et 20 % pour ce facteur combien rare et difficile que j'ai appelé efficacité (le pouvoir de produire un effet). Ce mot est utilisé pour décrire un élément assez indéfinissable que tous les danseurs hors pair réussissent à produire.

Une autre description pourrait être : "la volonté de gagnez", "le dynamisme", "t'agressivité", "la magie", "l'enthousiasme", "l'omniprésence", etc.
En conséquence, l'addition des valeurs des deux Groupes nous donne un maximum de 60 % pour le Groupe I et de 40 % pour le Groupe II.

Le jugement fondé sur une telle évaluation des six facteurs principaux que doit posséder un danseur de compétition signifierait que l'ordre final de mérite attribué aux six couples d'une finale serait équilibré de façon à assurer que les premières places reviennent aux couples qui se sont montrés forts tant en qualité qu'en magnétisme de foule, mais que les couples de forte personnalité qui n'ont pas été assez forts sur les éléments qui produisent la qualité ne pourront jamais recevoir les récompenses suprêmes.

Il est important de notez que, bien que l'évaluation des facteurs du Groupe II sera normalement faite par les mêmes juges, une grande expertise technique et artistique ne sera pas nécessaire pour jugez de la valeur d'une prestation dans ce groupe. En fait, le jugement du public des facteurs du Groupe II serait probablement aussi juste que celui du Jury.

Il existe une autre raison pour laquelle les notes des juges doivent être équilibrées en faveur des facteurs du Groupe I.

Si le juge donne plus d'importance, et donc de plus fortes notes, aux facteurs du Groupe II, l'expertise poux laquelle on l'emploie n'est pas utilisée et le jugement porté n'est pas meilleur que celui du profane.

Si les résultats des compétiteurs sont basés sur de telles évaluations, la qualité produite par les compétiteurs dégénérera et la nécessité d'un jury de juges professionnels ne se fera plus sentir. En ce cas non plus, Les compétiteurs n'auront nul besoin des services de professeurs et d'entraîneurs de danse de société.

Il est triste de notez que les résultats de nombreuses compétitions actuellement, surtout en danses latines, tendent à ce qu'il semble que certains juges donnent une importance trop grande aux facteurs du Groupe II.

En résumé, nous voyons que durant les deux minutes que dure chaque danse dans chaque éliminatoire et dans la finale d'une compétition, le juge doit évaluer, comparer et porter un jugement, en prenant en compte six facteurs principaux de la prestation de chaque couple. Une tâche gigantesque - d'aucuns diraient impossible.

De façon à obtenir un jugement global équilibré qui soit bon pour l’avenir de la compétition et la profession de la danse, ce jugement doit accorder un maximum de 60 % à la qualité et 40 % à l'impact sur la foule.

A l'heure actuelle, il est nécessaire que le juge fasse mentalement cette évaluation détaillée. C'est mon opinion que dans l'intérêt tant du jugement que des relations publiques et pour l’information des compétiteurs et de leurs entraîneurs, il serait fortement souhaitable d'envisager que l'évaluation des facteurs des Groupes I et Il soit notée séparément par les juges.




Philippe Valade - Copyright (c) 2003 - Tous droits réservés.





21/08/2013

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